Le dernier combat de Kirishima

(le 24 mars 1996)

Retour à la page précédente "De Kirishima à Michinoku"      Retour à la page d'accueil

   Il pourrait paraître saugrenu, voire de mauvais goût, de détailler ici, image par image, ce dernier combat, qui n'est sans doute pas le plus glorieux de sa carrière et qui a laissé un souvenir proche du cauchemar à la plupart de ses admirateurs.  Toutefois, avec le recul de ces cinq années, il nous est peut-être possible de jeter un regard nouveau sur cette défaite en quelques secondes qui paraissait si incompréhensible à l'époque...  Car, si l'on regarde de près, on constate que contrairement à ce qu'on pourrait croire (tout s'est si vite passé !), Kirishima n'est pas resté passif; il s'est bel et bien battu, il s'est battu comme il avait coutume de le faire (ou presque - du moins autant que les circonstances pouvaient le lui permettre).  La victoire n'a pas été facile pour l'opposant; et ce n'est que grâce à une stratégie bien méditée d'avance que ce dernier a pu se l'approprier (quand  l'adversaire est difficile à battre, la seule solution possible est de contourner la difficulté par une technique du type tsuridashi - à condition que celui-ci soit assez léger pour pouvoir être soulevé!)

Pour voir chaque photo agrandie, cliquer sur l'image.
Il monte sur le dohyô, se dirige vers le sel après avoir salué son adversaire, se tourne vers l'intérieur,
3
exécute le chiri en faisant face à l'adversaire, reprend du sel, qu'il projette devant lui...
6
se place au centre pour le shikiri, en face de Kotoryû
9

10 11 12
dernier shikiri-naoshi: sa concentration se fait plus intense
13 14 15
Il se relève, se concentre une dernière fois sur son équilibre, délicatement,
presque méticuleusement, une jambe après l'autre, puis dirige de nouveau toute son attention
sur son adversaire pour se synchroniser avec lui en suivant de près son mouvement
16 17 18
Le tachiai -  Kirishima encaisse les premiers coups de Kotoryû en les déviant
19 20 21

22 23 24
il tente de passer de force sa main gauche vers la ceinture, mais elle est coincée par son adversaire;
il perd du terrain jusqu'à la lisière du dohyô
25 26 27
il refoule l'adversaire jusqu'au centre par la force de ses jambes
28 29 30
et se retrouve plaqué contre l'adversaire, le torse redressé (sans prise de son côté),
ce qui permet à Kotoryû de l'attirer pour l'immobiliser et d'attraper son mawashi
31 32 33
dans cette mauvaise posture, tentative de Kirishima d'attraper le mawashi pour avoir une prise
34 35 36
Il résiste contre les tentatives de le soulever de Kotoryû,
37 38 39
alternativement avec une jambe ou l'autre
40 41 42
Kotoryû n'arrive pas au bout de son dessein et Kirishima se retrouve sur ses deux jambes,
résistant à la poussée avec ses genoux
43 44 45
la position est mauvaise;  il est soulevé une seconde fois, cette fois-ci assez haut
46 47 48
et est déposé quelques centimètres plus loin, à l'extérieur du cercle...
A la fraction de seconde près où il dépasse la limite, il se rend compte de sa défaite
et toute sa tension tombe instantanément.
49 50
il salue
51 52
et se retire
53 54
Ces images laissent transparaître sa manière bien personnelle de communiquer :
la foule comprend de loin son immense désaroi, comme par un effet dramatique amplifié.
Pour voir chaque photo agrandie, cliquer sur l'image.

   Ces images devraient rappeler à quel point Kirishima exécutait consciencieusement chaque geste,  le moindre détail avec une rigueur minutieuse, une sorte d'application emprunte d'humilité et de sobriété, tout en nuances, sans la moindre trace d'agressivité.  Il y mettait toute son âme.   Il transparaissait à chaque instant cet "attachement" à  la perfection, si touchant chez Kirishima, qui donne quelque chose d'insolite par son contraste en faisant oublier qu'il ne s'agit que d'une simple lutte contre un adversaire  -  ici, l'adversaire réel n'est pas celui qui se tient en face de lui, mais bel et bien celui qu'il possède en lui-même.  Tout cela se communique comme par miracle au public. C'est sans doute ce trait qui lui confère en partie cette "présence" subtile qui rayonne autour de lui, au point que certains affirmaient qu'il lui suffisait simplement de monter sur le dohyô pour faire ressentir au public toute la grandeur sublime du sumô.
 


Retour à la page précédente "De Kirishima à Michinoku"       Retour à la page d'accueil